La Presidence Francaise de l'Union Europeenne

Fara Autor | 09.07.2008

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HENRI PAUL, Ambassadeur de France en Roumanie

Le français, ce n’est pas seulement la langue de Rousseau, mais c’est aussi la langue de Renault

 

Depuis très longtemps, la France a apporté un soutien constant à la Roumanie en développant une série de partenariats et coopérations. Comme en Roumanie l’agriculture reste encore un problème à résoudre, je voudrais commencer, Monsieur l’Ambassadeur, par la coopération franco-roumaine dans le domaine de l’agriculture.

C’est un domaine dans lequel on a une coopération qui est très forte et qui est encore appelée à se développer, notamment dans des domaines justement très concrets. Par exemple, une chose qui concerne beaucoup les Roumains, c’est la question du patrimoine alimentaire, de la qualité des produits, un domaine dans lequel on travaille entre la France et la Roumanie. Il y a aussi le domaine de l’enseignement technique agricole: dans ce domaine, la Roumanie a accumulé un certain retard. On a commencé à travailler là-dessus, voilà un domaine très concret dans lequel je pense qu’on a fait des progrès. Nos idées, c’est vraiment d’être extrêmement concret et d’aider la Roumanie à partager nos vues et de l’aider à faire des progrès dans des domaines qu’elle a elle-même identifiés. Cela peut aussi être le cas, comme vous vous en souvenez, de la constitution de chambres d’agriculture, une meilleure structuration des professions agricoles. Cela, c’est aussi un domaine dans lequel je pense que l’on peut travailler ensemble.

On sait que la coopération administrative vise à accompagner la réforme de l’Etat en Roumanie.

Dans la réforme de l’administration publique, nous avons monté avec le ministre de l’Intérieur un groupe de travail commun franco-roumain pour favoriser la réforme de l’administration publique, et notamment la réforme des collectivités locales en Roumanie. D’ailleurs, on a eu la première réunion plénière de ce groupe de travail franco-roumain présidé du côté roumain par monsieur David et du côté français par le secrétaire général du Ministère de l’Intérieur, qui a fait une conférence sur l’exemple français d’utilisation des fonds structurels pour le développement régional. Donc, l’idée c’est, par cette coopération, de favoriser, d’identifier les domaines dans lesquels ont peut aider la réforme des collectivités locales en Roumanie, qui a lieu en ce moment. On va aussi installer au Ministère de l’Intérieur roumain un coopérant technique qui sera collaborateur du Ministre de l’Intérieur.

Et sur le terrain?

Sur le terrain, on a quand même besoin d’utiliser toute notre coopé­ration décentralisée, parce que comme vous le savez, la Roumanie est le pays qui a le plus de coopération décentralisée avec la France, puisqu’on a plus de 600 exemples, alors tous ne sont pas du même niveau, mais l’idée est qu’on puisse, par le biais de la coopération dé­centralisée, faire des opérations combinées entre collectivités locales françaises et collectivités locales roumaines. Dans la région de Timisoara, par exemple, vous avez la région Alsace qui est très désireuse de faire des choses, le président du conseil régional d’Alsace est venu, pour voir ce qu’on pourrait faire pour aider les collectivités roumaines à mieux utiliser les fonds européens.

J’ai l’intention de réunir tous les nouveaux présidents de judets, les inviter ici pour essayer justement avec eux de travailler sur des objectifs de coopération décentralisée parce que ce sont des gens qui sont proches des présidents des conseils généraux.

Vous pensez aussi à des échanges?

Bien sûr, mais d’ailleurs cela commence un petit peu à se faire aussi dans d’autres domaines, par exemple, dans le domaine universitaire, j’ai écrit à tous les présidents des conseils régionaux de France pour leur demander s’ils étaient intéressés pour développer entre les régions françaises et certaines régions roumaines des coopérations dans le domaine universitaire pour favoriser la mobilité étudiante, puisqu’en France les régions françaises ont des actions dans le domaine de l’accueil des étudiants, dans le domaine de l’enseignement.

Quel est le niveau de coopération dans le domaine de l’enseignement?

Sur l’enseignement, bonne nouvelle, c’est la première génération des élèves qui vont avoir le bac bilingue, pour plus d’une centaine d’élèves, ce qui est très positif et ce qui va permettre de mieux coordonner les filières universitaires, et en même temps le plan d’action pour le français qu’on a mis en place avec plusieurs objectifs; il y a un objectif de professionnalisation des professeurs de roumain: c’est-à-dire les professeurs roumains de français, pour leur donner des outils pédagogiques modernes pour mieux apprendre le français. Il faut qu’il y ait de plus en plus de lycées roumains qui puissent délivrer ce bac bilingue pour augmenter progressivement le nombre des lycées roumains qui peuvent avoir des classes bilingues mais, globalement, je trouve qu’il y a une très bonne qualité de l’enseignement du français en Roumanie. On dit toujours qu’en Roumanie le français perd du terrain, je crois que ce n’est pas vrai. Je crois que la francophonie ne perd pas du terrain en Roumanie, je pense justement que l’entrée de la Roumanie en Europe, et puis aussi le fait qu’on commence à ressentir en Roumanie les effets un peu négatifs de la mondialisation, de la globalisation, fait que des parents, des enseignants, des entreprises se rendent compte que le français ce n’est pas seulement la langue de Voltaire, la langue de Rousseau, mais c’est aussi la langue de Renault. Les investissements français en Roumanie augmentent: cette année, on a eu peut-être plus de 500-600 millions d’euros.

Derrière ces investissements français, vous avez des conséquences immédiates en termes de progression du français. À Cluj, il y a eu un investissement d’un groupe d’assurance français qui s’appelle Groupama, qui investit 350 millions pour acheter des assurances roumaines de la Banca Transilvania. Partout, je constate l’augmentation des cours de langues parce qu’on a besoin de parler en français. Quand on me parle de la baisse du français, je pense que c’est une vision qui est un peu étroite. La présence forte d’industries et d’entreprises françaises rend nécessaire l’apprentissage du français et aboutit à une augmentation des cours de langue professionnalisants. Il y a 950.000 élèves qui apprennent le français, ce qui est énorme. La Roumanie, c’est le pays où il y a le plus d’élèves qui apprennent le français, le pays qui a le plus d’étudiants en France, tout ça c’est un point très positif.

La réforme judiciaire en Roumanie reste encore un domaine très sensible. Comment commentez-vous l’évolution de ces réformes?

En Roumanie, ce qui a beaucoup manqué, à mon avis, pour la réforme de la justice, c’est d’abord des bases juridiques stables; quand vous changez la loi en permanence, il est très difficile de reformer la justice. Pour avoir une bonne réforme de la justice, il ne faut pas changer la loi tout le temps. Vous êtes en Roumanie en train de réformer tous les codes de procédure, vous êtes en train de moderniser votre appareil juridique et ça prend beaucoup de temps parce que le système légal, lé­gislatif est un système très compliqué qui s’auto-bloque très facilement. Dès qu’on a veut faire une réforme, on a immédiatement des freins à la réforme, alors de ce point de vue-là, ce que j’espère c’est qu’il y ait une certaine stabilité. Il y a une certaine instabilité juridique à laquelle il faudrait un jour mettre fin, et il faudrait surtout arrêter de critiquer tout le temps les juges, les procureurs, l’agence d’intégrité. Il faudrait les laisser travailler tranquillement. Je pense qu’on en parle beaucoup trop et c’est un peu au détriment des actions.

Par ailleurs, ce que je constate c’est qu’il y a quand même des progrès qui sont faits dans la lutte contre la corruption puisque maintenant l’Agence Nationale d’Intégrité me semble commencer à fonctionner. C’est le début. On peut pas non plus demander à la Roumanie de faire en 4 ans ce que tous que les autres ont fait en 200 ans, c’est quand même difficile.

Le problème, c’est que le politique veut contrôler le pouvoir judiciaire.

Comme partout! Si vous relisez Saint Simon vous verrez les paroles qu’on prononçait à l’encontre des Parlements, c’est une réalité qui a existé de tous temps, les juges étaient un peu réticents à subir les instructions de corps. La politique et le corps politique ont toujours souhaité contrôler les juges, et c’est une réalité dans tous les pays latins, qui est permanente. Pour pouvoir arriver à une certaine forme d’équilibre entre le corps politique et les juges, il faut beaucoup de temps, il faut beaucoup de crises. Laisser les juges travailler et arrêter de les critiquer. Il faut qu’ils restent quant même indépendants d’esprit, c’est important et en même temps, il faut qu’il y ait une déontologie générale et tout ça, une fois de plus, je pense que cela demande du temps et de la tranquillité, du calme, et qu’on ne soit pas tout le temps dans des périodes où l’on est trop sous le feu de l’action. Evidemment, en même temps, on demande à la Roumanie de faire des progrès dans ce domaine, donc inévitablement on est un peu sous le feu des projecteurs.

J’aimerais parler du modèle de la culture française.

Ecoutez, la culture, d’abord, c’est quelque chose qui coûte cher. Il faut pouvoir, si on veut avoir une politique culturelle, il faut qu’on sorte de l’argent. C’est la première chose. En France, on met de l’argent par différents moyens, pas uniquement des subventions publiques. Il y a évidemment un budget de l’Etat, mais il y a aussi une grosse part des mécénats. Le mécénat culturel en France est très développé. Par exemple ici, à l’ambassade, je ne pourrais pas faire la politique culturelle que je souhaite faire sans avoir le concours des entreprises. Tous les jours, je les remercie, tous les jours je les vois, tous les jours je les soutiens, et ils me soutiennent, donc si j’avais une suggestion à faire en Roumanie, ce serait: Essayez de développer le mécénat culturel des entreprises! Les entreprises roumaines pourraient contribuer au mécénat culturel pour les institutions culturelles roumaines. Dans le modèle américain, la culture est pratiquement entièrement financée par les entreprises. Il y a beaucoup de pays et en particulier des pays libéraux dans lesquels la culture est beaucoup, beaucoup, financée par des entreprises privées. En Roumanie, il faut peut-être faire un cocktail entre les deux, parce que, bien sûr, on a aussi besoin que les entreprises privées contribuent au budget de l’Etat par les impôts.

Et dans le domaine du patrimoine?

Dans le domaine du patrimoine, vous avez d’énormes aides fiscales. Alors, vous distinguez entre patrimoine public et patrimoine privé. Le patrimoine public est entiè­rement financé par l’Etat et coûte très, très cher. Si je prends les monuments historiques appartenant à l’Etat et les subventions données aux monuments historiques en général, vous avez de l’ordre de 400-500 millions d’euros environ, ce qui est quant même beaucoup, sur un budget du Ministère de la Culture qui est de 3 milliards, et puis il y a d’autres éléments du patrimoine qui sont subventionnés par ailleurs, par exemple, le patrimoine cinématographique, le patrimoine photo, le patrimoine cinéma etc. Pour les monuments historiques privés, vous avez d’énormes déductions fiscales, avec certaines conditions. Quand c’est un type de monument historique classé, ce n’est pas comme un monument historique inscrit, mais vous avez d’énormes subventions pour les travaux et vous avez des déductions fiscales importantes. Il y a une dépense fiscale importante dans le domaine culturel traditionnel en France qui n’est pas négligeable et qui aide beaucoup parce que le patrimoine historique français est très, très lourd, une cathédrale par exemple, les ponts historiques...

Mais ce qui est dommage ici, c’est qu’on n’a pas retenu la culture parmi les fonds du patrimoine culturel, parmi les possibilités de financement sur des fonds européens. On peut peut-être le faire par le biais du tourisme, mais je crois qu’il ne faut pas trop confondre le tourisme et la culture, le patrimoine culturel. C’est un peu une erreur. C’est une erreur qui est parfois commise dans certains pays voisins, c’est le même ministère qui s’occupe de la culture et du tourisme. Ce n’est pas très sain.

En France, on est dans un système qui a une vieille tradition selon laquelle la culture est plutôt du domaine de l’Etat et par la suite il est devenu quant même de plus en plus du domaine des collectivités locales, même si il y a des fortes réticences.

 

Interview realisée par Rodica Palade

 

 

FLORENCE DOBELLE, Conseillère pour les questions économiques de l’Ambassade de France en Roumanie

"L’appartenance de la Roumanie à l’Union Européenne offre aux investisseurs une lisibilité plus grande sur l’avenir du pays"

 

Quels sont les domaines dans lesquels la Roumanie béné­ficie de l’expertise française afin d’atteindre les niveaux de dé­veloppement de l’Union Européenne?

L’agriculture est sans conteste l’un des tout premiers domaines de coopération franco-roumaine. Il s’agit du premier champ de coopération cité par le partenariat stratégique signé par les présidents des deux pays le 4 février dernier à Bucarest. L’expertise française mise à disposition des autorités roumaines couvre une large palette de sujets:

- mise en place du plan national de développement rural (8,2 milliards d’euros de fonds communautaires pour la période 2007-2013), qui devrait permettre à la Roumanie de redevenir une grande puissance agricole européenne;

- élaboration des dispositions législatives sur l’organisation des filières de productions agricoles, des chambres d’agriculture, de l’agence pour les produits traditionnels;

- modernisation des secteurs des fruits et légumes (normes de commercialisation, organisation des producteurs, mise en place de l’organisation commune de marché sur le territoire roumain), du vignoble (dont l’organisation des aides à la replantation), mise en conformité des normes phytosanitaires avec les règles de l’Union Européenne.

Récemment, à la demande du premier ministre de Roumanie, l’enseignement agricole a été inclus dans le champ de cette coopération, sachant que la France dispose d’une expérience unique avec plus de 800 lycées d’enseignement agricole et un taux d’insertion professionnelle supérieur à 95%.

L’environnement est un autre domaine de coopération où la France, avec l’Agence Française pour l’Environnement et la Maîtrise de l’Energie, (ADEME), s’est engagée très tôt, dès 1991, aux côtés de la Roumanie. Elle a en 2003 conclu un accord avec son homologue en Roumanie, l’Agence pour la Conservation de l’Energie (ARCE), qui a formalisé et pérennisé cette coopération. Ont été ainsi mises en œuvre des actions d’efficacité énergétique (dans le bâtiment et dans l’industrie) liées au programme Intelligent Energy Europe. Avec la montée en puissance de la lutte contre le changement climatique, l’ADEME et l’ARCE ont renouvelé leur convention en avril dernier, dans le cadre du partenariat stratégique.

Comme vous le savez, le partenariat stratégique se fixe entre autres objectifs de rechercher ensemble les moyens de contribuer à la diversification des ressources énergétiques de l’UE et de renforcer sa sécurité d’approvisionnement. La visite du premier ministre de Roumanie à Paris en avril dernier a permis le démarrage d’une coopération entre le Commissariat à l’Énergie Atomique et l’Institut de Recherche Nucléaire de Pitesti (ICN). Dans le cadre de cet accord, l’Agence Nucléaire Roumaine a émis le souhait de collaborer avec des équipes françaises sur différents thèmes de recherche, dont le réacteur Jules Horowitz situé à Cadarache (Haute Provence). Un jeune scientifique roumain doit être détaché sur ce projet à partir du 1er septembre 2008 pour une période six mois.

Par ailleurs, la France accueille d’ores et déjà soixante-dix chercheurs roumains dans ses équipes placée au sein du Centre Européen de Recherche Nucléaire (CERN) à Genève, auprès duquel l’Agence Roumaine pour la Recherche (ANCS) a déposé un dossier d’adhésion.

Les finances - douanes, fiscalité, comptabilité, audit - représentent un autre domaine où la coopération franco-roumaine est importante et repose sur d’étroites relations nouées dès les débuts de la transition. En 2004, ces relations ont été formalisées avec l’ouverture d’une antenne à Bucarest de l’agence de coopération technique internationale des Ministères Français de l’Économie et du Budget, dont le budget d’actions engagées a augmenté de 50% en 2007 par rapport à 2006 et qui gère 22 jumelages. Avec l’entrée de la Roumanie dans l’Union Européenne, cette coopération couvre aussi des aspects liés à la gestion des fonds structurels, tels que l’audit et la certification des comptes.

L’importance, unique en Europe, des relations nouées dès 1990 entre les collectivités locales françaises et roumaines - plus de 600 jumelages (611 très exactement) - devrait de plus en plus être un vecteur de coopération économique sur des sujets cruciaux tels que l’absorption des fonds européens, l’attractivité des territoires, le respect de l’environnement, l’urbanisme, le transport urbain.

Rappelons que le développement des infrastructures de transports, l’un des domaines de compétence mondiale de l’ingénierie française - figure aussi parmi les thèmes de coopération relevés par le partenariat straté­gique. La France est prête à apporter son soutien à la construction des réseaux transeuropéens, notamment ferroviaire et routier. Un séminaire franco-roumain, qui avait réuni, avec le soutien de la Commission Européenne, de la BEI et de la BERD, plus de deux cents responsables roumains du secteur, avait été consacré en avril 2007 au rôle que le partenariat public privé (PPP) peut jouer pour le développement des infrastructures de transport. Un autre séminaire sera organisé au premier semestre 2009 sur le thème des transports - tous modes de transports confondus - et du développement durable, qui devrait également mobiliser une large audience.

Permettez-moi de conclure sur le dynamisme de coopérations publiques-privées dans le domaine de l’éducation, telle que celle lancée par le Groupement National Français pour la Formation Automobile (GNFA), avec le soutien du gouvernement roumain, qui a entrepris de former des professeurs de lycées techniques (expérience en cours sur 4 lycées, qui devrait être étendue à 17 établissements professionnels), afin de permettre une meilleure adéquation entre les besoins des entreprises du secteur automobile (y compris la maintenance) et les qualifications des jeunes.

Est-ce que le milieu d’affaires roumain satisfait les exigences des investisseurs français, tenant compte du fait que plusieurs diplomates étrangers ont critiqué la Roumanie à cause de la réforme judiciaire et à cause du manque de l’infrastructure?

L’appartenance de la Roumanie à l’Union Européenne offre aux investisseurs une lisibilité plus grande sur l’avenir du pays, qu’il s’agisse du processus de convergence économique ou d’harmonisation législative et réglementaire. Il s’agit de garanties importantes, notamment pour les PME, qui ont besoin d’un cadre juridique sûr, car elles sont plus vulnérables aux risques. Les programmes opérationnels liés à l’utilisation des fonds structurels et de cohésion (transports, environnement, compétitivité, développement régional, ressources humaines) sont lus et appréciés par les entreprises. Elles y trouvent des orientations très utiles pour mener à bien leurs projets.

L’insuffisance des infrastructures de transport peut constituer, surtout dans l’industrie, un handicap insurmontable, par exemple si les sources d’approvisionnement se trouvent trop éloignées, et qu’en outre il n’existe quasiment plus de ressources humaines à embaucher. Il s’agit sans doute du principal défi auquel la Roumanie doit répondre sur les toutes prochaines années pour assurer les conditions d’une croissance pérenne. L’existence de fonds communautaires destinés à l’extension et à la modernisation des infrastructures de transport doit l’y aider, de même que les prêts que la Banque Européenne d’Investissement met en place, sachant qu’elle dispose à Bucarest d’une équipe d’experts dédiée aux études de faisabilité né­cessaires.

Qu’est-ce que la Roumanie pourrait faire pour devenir une destination préférée pour les touristes français?

Le nombre de visiteurs français en Roumanie a doublé en 2007 (185.015) par rapport au chiffre de 2004 (93.000), avec un "bond en avant" de + 43% en 2007 comparé à 2006. Ce "saut" quantitatif est indéniablement lié à la notoriété positive de la Roumanie suscitée par son entrée dans l’Union Européenne. Le cap des 200.000 devrait être franchi en 2008.

Ces visiteurs viennent souvent à titre individuel. Il s’agit d’un tourisme de découverte personnelle. Il est clair que le développement de circuits thématiques - écotourisme dans le Delta du Danube, agrotourisme en Maramures, viticole en Vallées de Prahova et du Danube rencontrerait un écho très favorable auprès de la clientèle française. La Roumanie est l’un des rares pays d’Europe à pouvoir offrir, à un tel degré un mixte entre une culture aussi ancienne et une authentique terre d’aventures.

Le Groupe Michelin a programmé la publication d’une carte routière Roumanie avant la fin 2008 et du Guide vert Michelin pour la rentrée 2008. Ce Guide est destiné à des lecteurs disposant d’un certain pouvoir d’achat et désireux de pratiquer un tourisme à forte connotation culturelle.

Comme vous le savez, à l’exception des sites de notoriété mondiale et du tourisme dit "de masse", pour lequel joue à plein l’effet prix, le développement du tourisme est étroitement lié à celui des infrastructures de transport. Il s’agit d’une contrainte majeure que tout schéma de développement touristique prend en compte. L’ouverture par la TAROM d’une liaison aérienne Bucarest-Tulcea (avec départ le jeudi soir et retour le dimanche soir) permettant de passer un week-end sur le Delta du Danube constitue un exemple intéressant de réponse.

 

Interview realisée par Armand Gosu

 

 

MARIA BERTEANU*, CRISTIAN PREDA**

Roumanie, Francophonie, éducation: bilan et perspectives

 

Au mois de septembre de l’année 2006, la Roumanie a été le pays hôte du XI-ème Sommet de la Francophonie. Le thème du Sommet, Technologies de l’information dans l’éducation, a produit un vif intérêt au niveau de tous les pays membres de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Pour la Roumanie, avoir été choisie comme pays hôte de cette prestigieuse Conférence a représenté un véritable honneur, car il s’agissait du premier pays d’Europe, hormis la France, qui a hébergé les travaux de l’instance suprême de la Francophonie.

Bâtir la Francophonie signifie beaucoup plus que de donner vie à une communauté imaginaire, vécue et pensée comme une alternative humaniste à l’actuelle mondialisation. Même si le fabricant de Francophonie reste toujours un fabricant d’idées et d’espoir, il doit être simultanément un créateur de coopération. Coopé­rer signifie tout d’abord partager, créer une forme de solidarité qui se trouve depuis le début au centre de l’engagement et des valeurs de la Communauté. Cette coopération peut être créatrice si elle est utile et contribue au développement durable des sociétés. Elle doit aller encore plus loin et à travers ses formes de manifestation doit engendrer l’internalisation des valeurs, doit avoir comme effet un sentiment d’appartenance, de responsabilité et de nécessité de l’action. Créer des coopérations qui n’existaient pas, s’emparer des opportunités offertes sont autant de chantiers possibles et réalisables, car il s’agit non seulement de fabriquer des outils, mais aussi des programmes, des procédures de mise en œuvre.

La Francophonie a représenté une des premières options de politique étrangère que la Roumanie a faite très tôt dans les années ‘90. A part la ligne pro-européenne et euro-atlantique, la Roumanie a défini son orientation en faveur des valeurs promues par la Francophonie en intégrant la Communauté des Etats et de gouvernements ayant le français en partage dès 1991, comme membre observateur. Depuis 1993, la Roumanie est membre de plein droit de cette Communauté.

La Roumanie est fière de faire partie de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Le but des actions déjà menées au sein de l’OIF a été de mettre en évidence le potentiel énorme que l’Europe Centrale et Orientale peut mobiliser au niveau de la coopération et de l’action commune. Dans cette région de l’Europe, la Roumanie est le vecteur de Francophonie le plus important par sa dimension et par la promotion de la langue française et des valeurs dont elle est porteuse. Avec 24 universités roumaines membres de l’Agence Universitaire de la Francophonie, qui réunissent la majorité des 40 000 étudiants francophones ; avec 14.000 professeurs de français et 88% des élèves qui apprennent le français à l’école, l’engagement de notre pays vers la protection et la promotion de la langue français est plus qu’une volonté, c’est une réalité. D’ailleurs, la tradition de l’enseignement de la langue française en Roumanie remonte au premier tiers du XIXème siècle. Depuis, le français a été vu comme l’idiome de la liberté et de la modernité et il a survécu même pendant les années du totalitarisme. Le choix d’apprendre et d’utiliser le français a été déterminé chez les Roumains par leur passion pour cette langue, tout autant que par les valeurs transmises par le biais de cet instrument.

La dimension européenne de la Francophonie peut et doit s’exprimer pleinement aujourd’hui. Elle offre le cadre idéal pour l’approfondissement des relations de coopération et de solidarité, non seulement entre le Nord et le Sud, mais aussi entre l’Est et le Sud. Une simple statistique nous montre que parmi les 68 membres de l’OIF, presque un tiers est représenté par des pays européens. A cela s’ajoute le fait que l’Union Européenne, à partir de l’année 2007 compte 27 Etats membres, dont 13 sont des membres de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Il faut prendre en compte aussi le fait que les trois villes-capitales de l’Union Européenne sont des villes francophones. L’Europe unie de demain doit assumer son identité multiple, à la fois déterminée non seulement par la géographie et par les valeurs communes, mais aussi par l’élé­ment francophone. La Roumanie s’est proposé d’être une voix de la Francophonie au sein de l’Union Européenne, et, en même temps, une voix de l’Europe au sein de la Francophonie.

Le Sommet de Bucarest a permis la mise en place d’un regard nouveau sur le rapport entre les technologies de l’information et l’éducation. Parler du développement durable de nos sociétés sans parler de l’éducation serait sans doute une erreur. Sans la production, la transmission et ensuite l’utilisation du savoir toute prétention de durabilité doit être écartée. Il peut y avoir un boom économique, il peut y avoir une période favorable, mais la pérennité du développement ne peut pas être envisagée.

Aujourd’hui, il y a presque 800 millions d’analphabètes dans le monde et le Sommet du Millénnaire +5 a constaté le peu de résultats qui ont été obtenus dans ce domaine. C’est précisément cette position extrêmement importante et cette situation très précaire de l’éducation dans certains pays qui a déterminé le choix du thème du XI-ème Sommet.

L’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation est une réalité incontournable aujourd’hui. Cependant, il faut garder un esprit ouvert et être conscients non seulement des avantages que ces technologies apportent dans notre vie, mais aussi des problèmes qu’elles posent. La fracture numérique qui existe quant au niveau d’accessibilité et d’utilisation de ces technologies et qui sépare le Nord et le Sud est une réalité. Dans ces conditions, quelqu’un pourrait se demander pourquoi, au moment où l’accès à une éducation de base n’est point garanti pour tous, il y a eu et il y a encore une pré­occupation de la Francophonie concernant l’introduction des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation, des outils qui demandent une infrastructure spécifique et des coûts supplémentaires, en plus d’une adaptation des méthodes d’enseignement. La ré­ponse est très simple: les technologies de l’information sont présentes dans tous les domaines de la vie sociale. Elles sont ici et elles vont y rester. Elles doivent être prises en compte pour permettre l’évolution et l’expression libre de tous les citoyens. L’alphabé­tisation numérique est tout aussi nécessaire que l’alphabétisation proprement-dite. Les individus doivent être capables d’utiliser ces technologies et en même temps d’être conscients des dangers qui peuvent apparaître. La démarche de l’UNESCO de soutenir la mise en place d’une société du savoir pour tous, société inclusive, qui permette à ses membres l’accès aux connaissances doit être prise en compte. La Francophonie, par son expertise, par les moyens et les programmes dont elle s’est dotée à travers le temps, peut apporter une plus-value essentielle aux solutions offertes à cette problématique.

La qualité de l’acte éducationnel est dé­terminée dans une mesure majoritaire par l’enseignant qui l’accompli. Il est fondamental que les formateurs soient tout d’abord ceux qui sont formés pour pouvoir ensuite contribuer à l’amélioration du processus d’enseignement. La Roumanie, en tant que pays hôte du Sommet, a dé­cidé de marquer d’une manière durable les décisions prises par l’instance suprême de la Francophonie. Le 23 mai 2007, le Gouvernement de la Roumanie a adopté l’arrêté concernant la création du système de bourses d’études doctorales et de recherche "Eugène Ionesco" pour les ressortissants étrangers dans les institutions d’enseignement supérieur de Roumanie. La Roumanie accorde, par contribution volontaire à l’Agence Universitaire de la Francophonie, un montant d’un million d’euros annuellement pour les doctorants et les chercheurs des pays du Sud, membres de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Le but de ce programme est de permettre aux chercheurs et aux doctorants des pays du Sud membres de l’OIF et de l’AUF de bénéficier d’un stage de maximum 10 mois dans 15 institutions d’enseignement supérieur roumaines, reconnues pour leur excellence dans des domaines d’enseignement et de recherche les plus divers. Le nombre minimum de bourses accordées annuellement est de 70. Les thèmes de recherche seront établis en fonction des priorités des universités d’origine et des universités d’accueil, mettant ainsi les bases d’une coopé­ration durable et pragmatique.

La gestion effective de l’évaluation et la sélection des candidats seront faites par l’Agence Universitaire de la Francophonie, dont l’expérience dans ce genre de programmes est bien connue. La coopération universitaire, déroulée par le biais de l’AUF, représente l’élément francophone le plus important et le plus dynamique en Europe Centrale et Orientale.

Ce programme ne devrait être que le début d’une initiative plus large, qui puisse démontrer l’ampleur de l’engagement francophone européen. Contribuer à la formation des formateurs, éléments fondamentaux du développement durable de tout pays, constitue la meilleure manière de mettre en pratique les valeurs communes de solidarité et de mise en commun qui se trouvent au cœur de la Francophonie.

Pour l’année universitaire 2007-2008, les candidatures de 33 chercheurs des pays du Sud ont été évaluées. 27 chercheurs ont été acceptés et ils ont déjà commencé leur travail dans les universités roumaines. La présence massive (un tiers du nombre total) des ressortissants des pays de l’Afrique nous permet de croire à l’utilité de ce programme et d’être fiers de la contribution de la Roumanie dans le développement durable de ces Etats.

 

* Maria Berteanu est directeur affaires francophones, MAE.

** Cristian Preda est représentant personnel du Président de la Roumanie pour la Francophonie.

 

 

DACIAN CIOLOS, le Ministre roumain de l’Agriculture et du Développement Durable

"Je suis un «produit» de la coopération franco-roumaine"

 

Quel est le rôle joué par l’école d’agriculture française dans votre formation professionnelle?

Dans ma formation d’agro-économiste, l’école agricole roumaine a contribuée à ma formation technique, et l’é­cole française à ma formation socio-économique agricole et rurale. Cette double formation, à l’Est et à l’Ouest m’a aidé dans la construction de ma vision critique sur les systèmes agricoles et surtout sur le processus de transition de l’agriculture de l’économie planifiée vers l’économie de marché. Je peux dire, par ailleurs, que j’ai approfondi l’économie agricole et rurale dans le pays qui, grâce aussi à son système de formation, est devenu le premier pays agricole de l’UE et l’un des principaux exportateurs de produits alimentaires du monde.

Je dirai donc que je suis un "produit" de la coopération franco-roumaine dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche agricole. J’essaie maintenant de mettre en valeur cet atout par une très étroite collaboration au niveau ministériel entre la France et la Roumanie durant la Présidence française de l’UE, pré­sidence qui va devoir conduire les débats sur une nouvelle adaptation de la Politique Agricole Commune. Cette collaboration est facilitée aussi par la relation personnelle que j’ai avec Michel Barnier, mon homologue français, que j’apprécie non seulement pour sa diplomatie mais aussi pour ses convictions européennes.

Quels sont les atouts et quels sont les points faibles de l’enseignement agricole français?

Je ne peux pas faire une appréciation générale de l’enseignement agricole français J’ai eu l’occasion d’etudier dans deux écoles supérieures agronomiques francaises, celle de Rennes et celle de Montpellier. A partir de cette expérience, je peux mettre en évidence certains élé­ments. Comme atouts:

- développe l’esprit créatif de l’étudiant et ne force pas l’apprentissage par cœur;

- assure la mise en situation réelle et apprend à trouver des solutions en appliquant la théorie à la pratique;

- donne de la méthode pour analyser une situation;

- l’enseignement agricole français à un fort lien avec la pratique, technique et manageriale.

Comme points faibles:

- un peu trop tourné vers les réalités françaises et pas assez ouvert vers le monde (mais c’est l’avis d’un étranger, intéressé aussi par ce qui se passe à l’extérieur de la France);

- très sectoriel et pas assez "horizontal";

- l’enseignement supérieur agricole est très élitiste. Cela pourrait être considéré comme un atout, mais des fois les étudiants en agronomie sont un peu isolés par rapport au reste du monde universitaire.

En tout cas, c’est la formation agronomique française qui m’a donné les clefs de lecture du monde agricole européen et mondial, notamment en terme d’organisation des marchés et de politiques agricoles.

Qu’est-ce que les agriculteurs roumains doivent apprendre des agriculteurs français et qu’est-ce qu’ils doivent rejeter?

Je crois que l’organisation professionnelle des agriculteurs français est vraiment exemplaire. Je pense à l’organisation syndicale (de représentation et défense des intérêts du secteur dans la société et auprès du monde politique), mais aussi l’organisation à caractère économique, comme c’est le cas des coopératives de collecte et de commercialisation des produits agricoles (lait, fromage, légumes et fruits, céréales etc.), des coopératives d’achat en commun des semences, engrais etc., des associations d’utilisation en commun du matériel agricole (tracteurs etc.).

Un exemple d’organisation efficace est celui des chambres départementales (au niveau du "judet") d’agriculture dirigées par les agriculteurs et qui assurent à travers les services techniques, l’encadrement technique et économique des agriculteurs au niveau local. C’est un modèle intéressant de décentralisation des services agricoles, dirigés directement par les représentants des agriculteurs au niveau local.

Peut-être que l’intensification excessive de la production agricole dans certaines régions de France, notamment la production céréalière certainement, celle du porc, de la volaille, que posent maintenant des problèmes de pollution, devraient être un signal d’alarme pour les agriculteurs roumains, notamment pour les grandes fermes. Ce n’est pas toujours le productivisme qui mène à l’augmentation des revenus des agriculteurs; la production de qualité, vendue à un prix plus élevé, peut aussi faire l’affaire.

Quels sont les domaines de collaboration entre les agriculteurs roumains et français et quels sont les résultats de cette collaboration?

Au niveau strictement économique, la coopération pour la commercialisation du matériel agricole (machines agricoles) et matériel génétique animal (vaches, chèvres, brebis de race à valeur génétique élevée) semble bien marcher. Il y a également de plus en plus d’échanges d’expérience entre les organisations des agriculteurs des deux pays et j’ai essayé d’encourager ce genre de rencontres en qualité de ministre, car cela me semble très important qu’au-delà d’une bonne relation entre les deux ministres et les administrations agricoles, il y ait une bonne relation entre les organisations professionnelles agricoles. Nous avons bénéficié de l’appui français très consistant dans l’élaboration du Plan National du Développement Rural, mais aussi dans l’opérationalisation des agences de payement.

Par ailleurs, comme fruit des relations étroites qui se sont établies ces dernières années entre les éleveurs des deux pays, la Roumanie sera invitée d’honneur au Sommet de l’élevage de Clermont Ferrand cet automne, un des plus grands salons d’agriculture spécialisé dans l’élevage de l’Union Européenne.

Est-ce que vous considérez que le marché français, comme partie composante du marché de l’Union Européenne, pourrait constituer une destination pour les produits agricoles roumains? Si oui, quels sont ces produits?

Je pense que dans les prochainés années, les producteurs agricoles roumains doivent regagner le marché local roumain, car nous sommes importateurs dans beaucoup des secteurs agricoles. Cependant, les producteurs agricoles roumains utilisent déjà les opportunités du marché européen, dont le marché roumain fait partie, quand ils arrivent à être compétitifs au niveau du prix, et je pense notamment aux oléagineux, viande, produits bio, dont le marché français semble être très demandeur.

 

Interview réalisée par Armand Gosu

 

 

Actions de coopération bilatérale entre la Roumanie et la France dans le domaine de l’agroalimentaire

 

Comité d’Action Agricole Roumanie-France

Suite aux discussions des ministres de l’Agriculture de la Roumanie et de la France, qui ont eu lieu au mois d’avril 2006, à l’occasion d’une visite de travail à Paris du ministre de l’Agriculture de la Roumanie, il a été décidé d’établir un Comité d’Action Agricole Roumanie-France afin de relancer la coopération bilatérale.

La première réunion de ce Comité a eu lieu à Bucarest, en juillet 2006. Le chef de la délégation française était M. Jean-Marie Aurand, Directeur Général pour Politiques Economiques et Internationales au Ministère Français de l’Agriculture. À l’occasion de cette réunion a été présentée la situation des agricultures française et roumaine, ainsi que les perspectives de leur développement, en tenant compte des prévisions de la Politique Agricole Commune (PAC) et des possibilités offertes par les fonds prévus pour le financement du pilier 2 de PAC (développement rural). Un des moyens de développement de l’agriculture qui contribue en même temps à la solution du problème énergétique, est la culture des plantes "énergétiques" - colza, maïs, betterave afin d’obtenir des biocombustibles. La partie française a attiré l’attention sur la tendance à la réduction de l’appui financier octroyé par la PAC, dont doivent tenir compte les fermiers, qui seront confrontés de plus en plus à l’avenir avec la concurrence de ceux des tiers pays.

La réunion suivante de ce Comité a eu lieu à Paris, pendant la période des 24-25 juillet 2007, la délégation roumaine étant dirigée par Mme Cornelia Harabagiu, Secré­taire d’Etat, et la délégation française par M. Jean-Marie Aurand. Les sujets abordés à l’occasion de la réunion du Comité ont été la réforme du vin, la réforme du sucre, le stade des négociations au sein de l’OMC, les mesures préconisées dans le cadre du Bilan de Santé de la PAC. On a présenté les points de vue des deux parties sur les problèmes respectifs, en essayant d’arriver à la clarification des options disponibles et à une position commune.

Le 3 juin 2008 a eu lieu à Paris la 3ème réunion du Comité d’Action Agricole Roumanie-France. La délégation roumaine a été dirigée par Mme Mihaela Luca, Sous-secrétaire d’Etat, et la délégation française par M. Jean-Marie Aurand, Directeur General. La partie française a présenté les priorités et le calendrier de la Présidence de l’UE, que la France détiendra entre 1 jouillet-31 décembre 2008. Les problèmes abordés ont été ceux qui préoccupent en ce moment les deux parties, c’est-à-dire: "le bilan de santé" de la réforme de la PAC, l’avenir de la PAC, les négociations avec l’OMC, les standards de commercialisation des fruits et légumes, le Mémorandum français sur les filières de produits, le Mé­morandum sur les importations de produits alimentaires, la coopération bilatérale.

 

Collaboration entre APIA et ONIGC

La collaboration avec l’Office National Interprofessionnel des Grandes Cultures (ONIGC) a commencé dès la phase de fondation de la nouvelle agence roumaine de payements et intervention qui devait devenir l’APIA après l’adhésion.

Il y a eu pendant les dernières années plusieurs missions d’experts de l’ONIGC et des autres agences de payement de France, dans le cadre de programmes de pré- et post adhésion, couvrant une diversité d’activités dans les compétences de l’APIA.

Le 29 mai 2007 on a signé à Bucarest le Protocole de parteneriat entre l’APIA, d’une part, et l’ONIGC avec l’Agence Unique de Payement (AUP) de France d’autre part. Celui-ci a pour but la création du cadre pour le déroulement d’un programme d’échanges techniques dans le domaine de la gestion des marchés de produits agricoles, des mesures d’intervention, des mesures de commerce extérieur, ainsi que des aides directes en faveur des agriculteurs.

Concrètement, le Protocole propose une large collaboration concrétisée par des analyses et des recommandations technico-économiques, des échanges d’informations économiques, des études d’évolutions et des tendances des organisations communes de marché, par la préparation des négociations bilatérales et multilatérales, la formation et le perfectionnement des cadres.

Jusqu’à présent, dans le cadre du Protocole conclu avec l’ONIGC et l’AUP, a eu lieu une seule visite d’études, dans la période 18-23 novembre 2007, financée par des fonds TAIEX.

La thématique de la visite a été l’information de la partie roumaine sur l’expérience de l’ONIGC / Viniflhor / Office de l’Elevage dans le domaine de la mise en œuvre du plan européen annuel d’aides alimentaires destinées aux personnes les plus défavorisées d’Europe (PEAD) et dans le domaine de la promotion des produits agricoles communautaires.

La visite a permis une cristallisation des connaissances sur les deux thématiques et la finalisation de plusieurs documents qui étaient à ce moment en état de pré­paration à l’APIA, principalement des Manuels des procédures.

A l’issue de la visite, tant la partie roumaine que la partie française, ont apprécié les résultats concrets et ont exprimé le désir commun de mettre en application le Protocole par un programme concret de visites et échanges d’informations / documentation.

En faveur de cette action plaident plusieurs arguments:

- l’exceptionnelle expérience accumulée par les institutions françaises dans la mise en oeuvre des programmes communautaires, y compris aides et promotion, les agences de payement de France étant non seulement des pionniers dans la construction européenne, mais aussi des structures particulièrement actives dans l’activité présente de l’UE;

- le système institutionnel au niveau macro-économique similaire ou identique dans les deux pays;

- la communication particulièrement bonne entre les deux parties, liées par une histoire commune, par la francophonie, par une culture commune et des mentalités similaires.

             

A présent, des actions de coopération entre l’Agence Nationale de Consultance Agricole (ANCA) de Roumanie et l’Assemblée Permanente des Chambres d’agriculture (APCA) de France sont en cours dans le but d’introduire en Roumanie le système des Chambres d’agriculture.

 

 

ALEXANDRU MATEI*

Une addiction

 

N’eût été une pléiade d’excellents professeurs à l’Université de Bucarest - dont Vlad Alexandrescu, Irina Badescu, Ioan Panzaru, Dolores et Radu Toma (puisque j’ai poursuivi des études de lettres, je tends à laisser de côté les professeurs de langue, qu’ils veuillent bien me le pardonner) - dont la profession était non pas de "dispenser des contenus" mais d’enseigner à penser, n’eût été ma tante, professeur de français au lycée et fascinée dans sa jeunesse par la noble culture française littéraire, reléguée de nos jours dans des remises patrimoniales que plus personne ne rouvre pour en faire revivre le contenu, n’eussent été, en fin, ces maîtres à penser tant décriés par leurs concitoyens mais portés aux nues par les Américains hypnotisés qui ont réussi à en faire dériver une théorie, politique, idéologique, herméneutique et morale appelée dé­sormais la French Theory, jamais ne serais-je arrivé à écrire et faire publier ce texte dans la revue dont le chiffre-titre, 22, renvoie à l’histoire post-moderne de mon pays.

J’aime la France de tout cet amour mâ­tiné de haine qui doit être le sentiment moderne par excellence, irréductible à l’un de ses côtés, tout comme la modernité ne peut être pensée en l’absence de l’un de ses composants, révolution et restauration, foi et méfiance, intrépidité et désarroi. La modernité "anti-moderne", la plus profonde intuition que le critique français le plus remarquable de notre époque, Antoine Compagnon, ait su formulée de l’histoire européenne post-1789, a imprégné, certes inconsciemment et d’autant plus indé­lé­bile, mon esprit d’ailleurs assez permissif, pour me diriger sur une voie intellectuelle dont il s’en faut de quelques lustres pour que les fruits mûrissent. J’espère néanmoins que ça va arriver au plus vite et que je serai capable de transformer tout ce que j’y aurai appris en modèle ou contre-modèle.

Ce que je suis en français, je pourrais tout simplement l’énumérer: penseur de la post-, hyper-, sur-modernité, de l’ère du vide et du simulacre, de l’image qui se dissout dans le réel - du présent donc; de l’histoire comme succession de révolutions pétant tout en l’air à chaque fois que le cercle s’achève; accro de la littérature pour autant que ses auteurs offrent moins ce que l’on attendrait d’eux, c’est-à-dire mimésis et signification et plutôt les sempiternelles surprises que sont l’expression et la signifiance; praticien du langage de la fin transformé depuis longtemps en prélude d’un viol toujours conjuré ou, avec un terme consacré aussi sur les rives de Dambovitza, "différé"…; marginal et ré­volté contre cette même culture qui se veut depuis deux siècles centrale par sa marginalité et par son esprit iconoclaste qui la rendent exceptionnelle. C’est chez elle que j’ai appris à fantasmer la révolte et la rupture, rêves universellement humains, plus humains que le legs humaniste laissé par le siècle, celui des Lumières, qui a vu l’écroulement d’un monde et la montée en puissance d’un autre dont la hantise de l’écroulement sera devenue depuis tout autant repoussoir et moteur de pensée et d’agir.

Il y a, je le sais, cette France dont tous les Français rêvent - de la prospérité, de la raison et de la méthode, du monumental ; de la culture populaire, du foot bariolé et des vélos publics, du Disney et de Cannes, des musées et de la Tour, du terroir et de Pascal Quignard, du TGV et des politiques sécuritaires, du SMIC et des "nouveaux pauvres". Je le veux bien, tout cela existe, Dieu merci, qui expriment un vécu vivant. Mais il y a un "impensé" français à mes yeux essentiel, qui veut que la bibliothèque du Centre Georges Pompidou désigne le Paris contemporain tout d’abord refuge des SDF et des dragueurs venus de tous les coins du monde pour se confronter à la délicieuse idée d’une culture démocratique dont seul le spectacle est à la hauteur des attentes, puisque la réalité vécue s’en retrouve tous les jours sur le trottoir de la rue Beaubourg: la queue interminable où, faute d’avoir sous la main les livres convoités, on discute tranquillement avec un prof colombien de Medelin; et dans le supermarché Ed vis-à-vis où, avec les 800 euros mensuels offerts par le Gouvernement français, il faut lâcher un peu de la prudence obligée qu’on prête par ailleurs aux achats alimentaires dans Paris.

Et j’aime Paris d’une nostalgie dont la révélation d’habiter et de circuler dans un musée vivant m’a frappée dans l’autobus 69 qui n’en finissait pas de m’emmener rue Gambetta ou j’habitais, à côté du Père- Lachaise, la nostalgie d’après le Paris des existentialistes, des soixante-huitards et des magistères préservés aujourd’hui dans des livres que je croyais emmagasiner les traces d’un charisme réel. Or, tout ce que je voyais autour de moi, vivant, n’était pas français. Les bagnoles et les pubs parlent anglais ou autres langues, les pieds noirs et les HLM dardent des regards intenses et étalent des façades délavées en contrepoint; les cours de M. Descombes et de M. Bouveresse, auxquels j’ai assisté à l’EHESS et au Collège de France présupposent la lecture de Talcott Parsons et de Wittgenstein; les "photocopilleuses" dangereusement vétustes (à Pompidou) et les ordinateurs rudimentaires de la bibliothèque Sainte-Geneviève (en 2003), où les élèves de lycée vous squattent toujours les places si âprement conquises défient les attentes: tout cela s’est instillé dans une république de lettres dont on constate - et on y compatit - la déshérence.

J’aime la France comme on aime un être qui s’est depuis peu mis à chanceler sur un piédestal qu’on prenait jusqu’alors pour le degré zéro de la culture européenne, en-dessous duquel l’existence des autres n’avait aucune importance.

 

* Alexandru Matei est Boursier du Gouvernement français 2003-2005, Docteur en lettres à l’EHESS de Paris et à l’Université de Bucarest.

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